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Christiane Riedel - Page 90

  • 2 LA CONCEPTION DES RÊVES DANS LA BIBLE

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    La dernière fois, pour pouvoir parler des rêves dans la Bible, nous avons examiné le sens des mots « rêve – songe - vision ». Nous avons vu qu’en français le rêve et le songe ont lieu dans le sommeil, tandis que la vision a lieu à l’état éveillé. Les trois mots par ailleurs désignent des expériences souvent jugées insensées et contestables. Cependant en hébreu et en grec ces mots ne font pas de distinction entre une perception physique et psychique et désignent des expériences réelles et incontestables.

    Je vous parle de l’hébreu et du grec parce que ce sont les 2 langues dans lesquelles la Bible a été écrite. Tout ce qui y concerne les rêves est donc écrit en hébreu et en grec. Voyons pourquoi.

     

    Un peu d’histoire

    La Bible est un livre qui rassemble les écrits de plus de 40 auteurs hébreux sur une période d’environ 1000 ans.
    Elle est composée de deux parties : l’Ancien et le Nouveau Testament. Le mot Testament signifie « Contrat » «  Témoignage » ou « Alliance », il s’agit de l’Alliance avec Dieu.
    - L’Ancien Testament est le livre sacré des Juifs : il comporte des récits historiques, des textes de lois, des poèmes, des textes prophétiques.

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    - Le Nouveau Testament est le livre sacré des Chrétiens : il relate la vie et l’enseignement du Christ, enseignement que ses premiers disciples ont transmis dans des lettres ou épîtres aux premiers chrétiens.
    La Bible est donc un ensemble de « témoignages » très variés, qui traitent de l’Alliance avec Dieu et abordent les grandes questions spirituelles : Qui est Dieu ? Qui est l'homme ? Y a-t-il une relation possible entre Dieu et l'homme et comment ?
    C'est le thème principal de la Bible entière.

     

    Les textes de l’Ancien Testament ont été écrits en hébreu classique, qui est toujours employé comme la langue sacrée, même si 500 ans avant J.-C. les Juifs, au quotidien, parlent une langue très proche de l’hébreu : l’araméen, la langue parlée qu’ils ont ramenée de Babylone, où ils ont été déportés au VI ème siècle avant J.-C. C’est en araméen que parlait le Christ et ses disciples.

    A la suite des conquêtes d’Alexandre le Grand, (335 - 323 avant J.C.) des Juifs s’installent en Egypte, à Alexandrie et parlent le grec, la langue internationale à l’époque. Environ 250 ans avant J.-C., ces Juifs d’Egypte, qui ne comprennent plus aussi bien l’hébreu classique, décident alors de traduire l’Ancien Testament en grec. Cette traduction est appelée la Septante.

     

    Le Nouveau Testament est aussi écrit en grec.
    Certains textes très rares ont été rédigés en araméen mais les Juifs chrétiens en Israël connaissaient aussi fort bien le grec. Les Evangiles, les Actes des Apôtres et toutes les Lettres des Apôtres aux fidèles sont écrits en grec.

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    Ainsi, les textes de l’Ancien Testament existent soit en hébreu, soit en grec.

    Les textes du Nouveau Testament sont en grec.

     

    Il faut maintenant souligner un fait d’importance. Quand on compare les deux sociétés, on constate que les Grecs et les Hébreux ont la même conception et la même expérience des rêves. Les traducteurs n’ont donc pas eu grande difficulté à trouver en grec les mots qui expriment l’expérience des Hébreux.

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    Cependant, pour ne pas alourdir mon propos, je ne vous présenterai pas la douzaine de termes grecs que le français traduit pauvrement et sans nuances par les mots songe, rêve ou vision.

     

    Après ce détour j’en arrive à mon propos d’aujourd’hui :

    Quelle est la conception du rêve dans la Bible ?

    A chaque fois, on peut lire que c’est l’Eternel qui vient s’adresser à l’homme dans les rêves et les visions. C’est une constante qui ne se dément jamais.

    Il n’y a pas d’autre présentation. C’est une donnée absolue, jamais contestée, du début à la fin de la Bible.

     

    En voici la première mention dans la Genèse, ch. 15, v. 1 :

    « La parole de l’Eternel fut adressée à Abraham dans une vision. »

     

    Et voici la dernière, celle de l’Apocalypse, un rêve gigantesque :

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    Jean présente ce qu’il voit et entend par ces mots :

    « Révélation de Jésus Christ, que Dieu lui a donnée…et qu’il fait connaître par l’envoi de son ange à son serviteur Jean…

    Moi, Jean, …je fus ravi en esprit et j’entendis derrière moi une voix forte…qui disait… »

     

    Du début à la fin, on retrouve la même façon de présenter le rêve :

    Dans le livre des Nombres, ch. 12, v. 6,on peut lire :

    « L’Eternel dit :

    Ecoutez bien mes paroles ! Lorsqu’il y aura parmi vous un prophète, c’est dans une vision, que moi, l’Eternel, je me révélerai à lui, c’est dans un rêve que je lui parlerai.

    Il n’en n’est pas ainsi de mon serviteur Moïse. Il est fidèle dans toute ma maison. Je lui parlerai bouche à bouche, je me révèle à lui sans énigmes… »

    Dieu par exemple est apparu à Moïse sous la forme d’un buisson ardent.

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    Citons aussi ce passage stupéfiant dans Joël, ch. 2, v. 28,où Dieu s’exprime encore à travers la bouche du prophète.

    « …..Vous saurez que je suis au milieu d’Israël,

    Que je suis l’Eternel votre dieu, et qu’il n’y en a point d’autre ;

    Et mon peuple ne sera plus jamais dans la confusion.

    Après cela, je répandrai mon esprit sur toute chair ;

    Vos fils et vos filles prophétiseront,

    Vos vieillards auront des rêves

    Et vos jeunes gens des visions.

    Même sur les serviteurs et sur les servantes

    Je répandrai mon esprit »

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    Quelle annonce ! Voilà une promesse très démocratique ! Le rêve, c’est le don que Dieu fait à tout le monde, quel que soit l’âge ou la position sociale, tout le monde rêve, tout le monde reçoit donc l’Esprit de Dieu.

     

    6 siècles après, le Nouveau Testament commence par le récit d’ un rêve, raconté par le disciple Matthieu. Mathieu était percepteur d’impôts, et, par nécessité professionnelle, il parlait aussi bien le grec que l’araméen. Il était également un homme cultivé qui connaissait l’hébreu, un comptable et un homme de lettres, qui savait aussi bien écrire que compter.

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    Mathieu, au ch. 1, v. 20., raconte le rêve de Joseph, qui découvre que Marie, sa fiancée est enceinte.

    « Comme il y pensait, voici un ange du Seigneur lui apparut en songe et dit :

    Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre avec toi Marie, ta femme, car l’enfant qu’elle a conçu vient du Saint Esprit ; elle enfantera un fils et tu lui donneras le nom de Jésus… »

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    Que Dieu parle dans les rêves, c’est encore ce qu’affirment les premiers chrétiens 200 ans plus tard. J’ai choisi le récit très émouvant de Sainte Perpétue pour vous le montrer.

    En 203, de nombreux chrétiens vivent en Afrique du Nord, où ils sont, comme ailleurs, persécutés par les Romains. Perpétue, une jeune femme de Carthage, vient de mettre au monde un petit garçon.

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    Elle est jetée en prison pour sa foi chrétienne.

    Là, elle écrit ce qu’elle vit, et elle raconte comment elle demande à Dieu de la guider et de la soutenir par les rêves. Elle lui demande aussi de lui dire si elle doit s’attendre au martyre ou à la libération.
    Cette façon de poser des questions aux rêves est une démarche universelle, qu’on retrouve dans toutes les civilisations et qui s’appelle l’incubation. A la même époque elle était également pratiquée dans les temples grecs et romains dédiés au dieu de la médecine et des rêves, Asclepios en grec ou Aesculapius en latin.


    Voici le récit de Perpétue :
    « Mon frère me dit :

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    - Ma sœur,..te voilà dans une position où tu peux demander une vision, afin qu’on te montre si tu dois t’attendre au martyre ou à la libération.
    Et moi, écrit Perpétue, consciente des bienfaits que Dieu m’avait si richement prodigués dans les dialogues que j’avais coutume d’avoir avec lui, je promis, remplie d’une foi confiante :
    - Demain, je te raconterai.

    Elle va donc demander à Dieu de lui répondre dans son rêve la nuit.

    « Puis, je demandai une vision et voici ce qui me fut montré. » Elle raconte alors son rêve, reçu le lendemain, et en donne l’interprétation :
    « Nous comprîmes que le rêve signifiait le prochain martyre ; à partir de là, nous ne plaçâmes plus aucune espérance dans ce monde-ci. »

    Elle meurt dans l’arène. (1)

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    Ce récit montre donc bien que pour les premiers chrétiens, Dieu parlait dans les rêves.

     

    Conclusion

    Quelle déduction pouvons-nous tirer maintenant de ces quelques récits ? Une constatation logique s’impose :

    A l’unanimité tous les chrétiens sont d’accord pour dire que la Bible est la Parole de Dieu. Et cette parole, où s’exprime-t-elle ? C’est bien dans les rêves, dans ces scénarios qui surgissent à la vue, dans ces paroles qu’on entend à l’oreille, sans intervention de la volonté consciente !

    Sur des siècles, des Hébreux, jusqu’aux premiers chrétiens, tous racontent  l’expérience que Dieu prend contact avec eux par le canal régulier des rêves, pour leur donner des informations et les guider.

    Leur conception, fondée, je le répète, sur l’expérience, affirme que l’être humain est en contact avec deux mondes aussi réels l’un que l’autre, un monde physique, matériel, extérieur et un monde non physique, intérieur, psychique, spirituel. L’un et l’autre font partie de sa nature et lui font vivre sa dimension humaine dans son intégralité.

     

    Mais « les chrétiens demandent souvent pourquoi Dieu ne leur parle plus, comme on croit qu’il l’a fait par le passé. ».

    A cette question Carl Gustav Jung répond tout à la fin de sa vie :

    « Quand on me pose cette question, je pense toujours à ce rabbin auquel on demandait pourquoi, alors que Dieu était si fréquemment apparu aux hommes autrefois, personne ne le voyait plus aujourd’hui. Le rabbin répondit :

    « Aujourd’hui, il n’y a plus personne qui soit capable de se courber assez bas. »

    La réponse est pertinente. Nous sommes si fascinés, si absorbés, par notre conscience subjective, que nous avons oublié ce fait de notoriété millénaire, que Dieu parle surtout dans les rêves et dans les visions. » (2)

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    Bibliographie

    (1) La passion de Perpétue, Marie Louise von Franz, Editions Jacqueline Renard; La Fontaine de Pierre

    (2) L’homme et ses symboles, Carl Gustav Jung, p. 102, éditions Robert Laffont

     

     

    Illustrations

    Manuscrit de la Bible en hébreu : creationwiki.org

    Le manuscrit le plus vieux de la Bible en grec. Il date du IVème siècle après J.-C. et a été retrouvé au Monastère Sainte Catherine sur le Mont Sinaï, par un religieux allemand en 1844 ; leplus-info

    Apocalypse de St Jean par Salvador Dali

    Tête raphaëlesque éclatée, par Salvador Dali

    Saint Mathieu par Ingres.

    Jeune femme, portrait du Fayoum

    Un homme, portrait du Fayoum

    Le Sacrement de la dernière Cène, Salvador Dali

     

     

     

  • 1 LES RÊVES ET LA BIBLE

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    Aujourd’hui, je vais entrer directement dans un sujet étonnant: « Les rêves et la Bible ». J’ai déjà abordé ce sujet à plusieurs reprises, et je vais le reprendre maintenant de façon plus approfondie.

    Je constate souvent en effet que bien des personnes qui s’intéressent aux rêves connaissent peu la Bible. Et pourtant, vous allez voir que le rêve et la Bible ne sont qu’une et même chose. Tous les livres de la Bible parlent des rêves, on en compte environ 250, ce qui fait un rêve toutes les 6 pages. C’est énorme, et pourtant on l’ignore.

    Eh bien, nous allons voir ce qu’il en est.

     

    Pour que le mot soit bien compris, voyons d’abord ce qu’on appelle un rêve.

    On appelle « rêves » ces images et scénarios, ces sensations, émotions, pensées qui viennent dans le sommeil, dans l’état inconscient. Cependant, toutes ces impressions peuvent surgir aussi à l’état conscient, éveillé. On les appelle alors des visions.

     

    Qu’est-ce qui caractérise ces expériences où l’on rêve ?

    1) Ce sont des impressions qui sont spontanées, involontaires et naturelles , qui ne sont pas provoquées par un stimuli extérieur matériel. Ce n’est pas le monde conscient qui provoque le rêve.

     

    2) Ensuite, ces phénomènes sont faits objectifs, mais ils sont  immatériels, ils ne sont pas palpables, et ils exercent un impact comme s’ils étaient réels, souvent même ils   provoquent des émotions intenses et inoubliables.

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    Pour pouvoir parler correctement des rêves dans la Bible, il est indispensable d’aborder le problème de la traduction.

    Les différents livres de la Bible, écrits entre 800 ans avant J.-C. et 200 ans après, ont été en effet rédigés en hébreu, en araméen et en grec. Quels que soient les mots employés dans les textes anciens, il faut se demander :

    Quels sont les mots dont les traducteurs disposent en langue française ?

     

    D’où vient le mot rêve ?

    Ce mot est neuf, il est apparu récemment il y a 350 ans, à l’époque de Louis XIV, vers 1650. Son origine est mal connue. Le mot viendrait d’une racine qui signifie   vagabonder, déraisonner et qui lui donne son sens négatif. Le rêve désigne les scénarios incohérents qui apparaissent quand on dort.

     

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    Avant le mot rêve, on employait le mot songe.

    Songe vient du latin sommeil, « somnus » ; comme le rêve il désigne ce qui apparaît quand on dort. Cependant, les traducteurs de la Bible en français vont l’employer de préférence. Les songes sont alors les « somnia a Deo missa »,  les songes envoyés par Dieu aux saints personnages, comme Joseph par exemple.

    Cette distinction n’existe ni en anglais, ni en allemand. Ces deux langues ne possèdent qu’un seul mot : dream ou Traum.

    Le mot songe possède aussi le sens négatif d’une illusion.

     

    Le mot vision

    Quant au mot, il  a d’abord désigné dans le vocabulaire religieux « une chose surnaturelle qui apparaît à la vue ».

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    En général, la vision apparaît quand on est éveillé, à l’état conscient. De nos jours, elle paraît suspecte et on la rapprocherait volontiers du mot hallucination.

    Voilà les différents sens de ces 3 mots dont les traducteurs disposent.

     

    Regardons maintenant ce qu’il en est en hébreu et en grec.

    Ces distinctions n’existent pas.

    En hébreu et en grec, les mots employés sont multiples.

    Ils désignent une expérience qui n’est pas provoquée par un stimulus venu du monde matériel. Cette expérience a lieu sans différence, aussi bien dans le sommeil qu’à l’état de veille, et se manifeste par des phénomènes visuels et auditifs : on trouve toujours les verbes : voir, regarder, entendre, écouter, d’un côté, associés aux verbes apparaître, dire, parler, de l’autre.

     

    Par exemple, environ 500 ans avant J.- C., on peut lire dans Job, au ch. 33 :

    « Dieu parle cependant, …

    Il parle par des rêves,  par des visions nocturnes,

    Quand les hommes sont livrés à un profond sommeil. »

    En fait les deux mots désignent la même expérience où l’on voit.

     

    Ezéchiel, lui, raconte, ch. 8 :

    « …comme j’étais assis dans ma maison…la main du Seigneur, de l’Eternel, tomba sur moi.

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    Je regardai et voici, c’était une figure ayant l’aspect d’un homme. Il me dit…

    Ici, la perception a lieu à l’état de veille.

     

    Les mots ne font pas de distinction entre une perception physique et non physique. Ils désignent une expérience spontanée, incontestable et réelle, même si elle n’est pas matérielle, c’est à dire une expérience psychique.

     

    Conclusion

    A la différence du français actuel, il n’y a pas de distinction catégorique en hébreu ou en grec entre les différents mots rêve- songe-vision -.

    Et même, quand on approfondit l’examen, on constate qu’on ne peut pas faire de différence entre rêve, songe, vision, vision angélique, apparition, révélation, extase, transport en esprit.

     

    En fait ces mots correspondent à la conception que les anciens avaient des rêves. Et c’est ce que nous examineront la prochaine fois.

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    Illustrations

    What dreams may come : Robin Williams et Annabella Sciorra : listal.com

    What dreams may come: coffeeandabookchick.com

    What dreams may come : tableau de zweeZwyy, zweewyy.deviantart.com

    Au delà de nos rêves, Robin Williams : fan-de-cinema.com