Nous avons vu la dernière fois comment en 64 avant JC. un rêve a lancé Jules César dans sa prodigieuse carrière.
Nous voici maintenant 25 ans plus tard, en – 44. Jules César est au faîte de sa gloire. Il a 55 ans. Il est désormais le maître de Rome. Il vient d’anéantir les troupes de Pompée, son adversaire romain. Il vient d’être nommé dictateur à vie.
Il a conquis la Gaule et étendu les frontières romaines du Rhin à l’Angleterre et l’Océan atlantique. Il a conquis l’Asie Mineure et tout le pourtour méditerranéen. Il est le maître du monde.
Ainsi est accompli ce rêve qu’il a reçu 25 ans plus tôt. Ce rêve lui annonçait qu’il soumettrait non seulement Rome, sa mère patrie, malgré les résistances des Romains, mais aussi la terre elle même.
Pour comprendre le rêve que nous allons voir aujourd’hui, il me semble nécessaire de vous présenter rapidement l’œuvre de cet homme étrange, mieux connu en France par Vercingétorix et Astérix que par les faits historiques, et qui marqua le monde romain et l’histoire universelle.
César, maître du monde, s’est montré un génie militaire, il se montre maintenant un génie politique, souple, réaliste, généreux. Il veut rallier à lui tous ceux qui sont capables de comprendre qu’un monde nouveau s’ébauche : le monde romain. Il fait preuve d’une largeur de vue révolutionnaire : Investi du pouvoir suprême, en peu de temps il réforme profondément les institutions de l’Etat romain :
- Il met fin à la guerre civile, se montre d’une grande clémence en accordant son pardon à ses adversaires politiques, à qui il n’hésite pas à confier des charges importantes.
- Il relève de leurs ruines les anciennes villes ennemies en encourageant l’émigration des prolétaires romains.
- Dès sa jeunesse César a été démocrate, il reste plus que jamais un grand et vrai démocrate social.
Pour lui, il faut rendre le monde romain socialement meilleur : il déclare sa haine des privilèges, et en premier celui de la fortune. Il combat les abus financiers en tous genres, réforme les impôts, contrôle sévèrement les gouverneurs et magistrats des provinces qui s’enrichissent aux dépens du peuple.
- Il fait distribuer à la population de l’argent venu de ses conquêtes ; aux soldats il donne des terres, il oblige les propriétaires terriens à employer, à côté des esclaves, des hommes libres qu’ils paient, procurant ainsi du travail aux pauvres.
- Avec sa propre fortune il organise des fêtes fabuleuses et multiplie au bénéfice du peuple romain des banquets et des spectacles pour 200.000 personnes.
- Il met aussi en route la plus grande des révolutions de l’Antiquité, celle de concilier la culture hellénistique et la discipline romaine.
Mais ces réformes ne sont pas approuvées par les aristocrates membres du Sénat, qui, sous prétexte de sauver la légalité républicaine nourrissent des intérêts plus personnels.
Le Sénat le flatte, il lui déclare le droit de porter constamment la couronne de lauriers et de prendre le titre d’imperator ; pour nuire à sa réputation il lui accorde même le droit d’avoir commerce avec toutes les femmes qu’il veut.
Les sénateurs qui dirigent la République romaine craignent la disparition du régime sénatorial, qui assure leur pouvoir. Ils ourdissent une grande conspiration contre le dictateur .
« Les ides de Mars » approchent, c’est ainsi qu’on appelle le15 mars, jour de fête dédié au dieu Mars, le dieu de la guerre. Ce jour là, en – 44, Jules César doit se rendre au Sénat pour y recevoir le titre de roi, non pas de Rome, mais du monde oriental.
César se prépare à cet événement, il cherche à connaître la volonté des dieux à son égard. Il se rend au temple et fait célébrer un sacrifice par le prêtre Spurinna. Ce dernier est un haruspice, c’est à dire qu’il sait examiner les entrailles de l’animal pour y lire la volonté des dieux. Spurinna découvre que l’imperator est en danger de mort jusqu’aux ides de mars, il prévient César immédiatement et insiste pour le dissuader de sortir de chez lui le 15 mars.
- Méfie toi, César, méfie-toi des ides de mars.
César qui entend bien, se pince le bras et déclare qu’on ne viendra pas à bout de sa vieille carcasse.
Des mises en garde surgissent aussi de toutes parts : l’un sur son passage lui glisse dans la main un papier qui dénonce un complot, un autre peu après lui glisse la liste des conspirateurs. César n’y fait pas attention.
De nombreux signes annoncent sa mort.
Vous savez que dans des circonstances dangereuses le rêve intervient, il prévient et prépare.
Le grand dictateur ne fait pas exception.
15 ans plus tôt, en – 59, César à l’âge de 41 ans a épousé Calpurnia, qui en avait 16. Elle a 31 ans maintenant et lui 55, l’un et l’autre se connaissent bien.
Plutarque raconte :
Dans la nuit du 14 au 15 mars, la veille de la fête des ides de mars, César est couché aux côtés de sa femme, lorsque tout à coup les portes et les fenêtres s'ouvrent d'elles-mêmes. César est réveillé en sursaut, il est troublé par les claquements qu’il vient d’entendre, la très vive clarté de la lune qui donne dans sa chambre l’impressionne et le met mal à l’aise.
Calpurnia, qui dort d'un sommeil profond, se met à gémir, elle prononce des mots inarticulés qu'il distingue mal,… elle pleure. A sa stupeur… il comprend qu’elle le pleure.Calpurnia est en train de rêver :
D’abord elle rêve que l’étendard de son mari, qui flotte sur le toit en dôme de la maison, est emporté par un coup de vent.
Puis elle aperçoit sur s