Quel nouveau sujet vais-je aborder avec vous maintenant ? Ce sera le rêve un peu « crade » !
La tâche de l’interprète de rêves est des plus difficiles : il lui faut être capable d’aborder tous les sujets. Cependant, le rêve ne vient pas vous parler de ce que vous savez déjà, mais de ce que vous ignorez ou ne voulez pas voir.
Les sujets abordés la nuit seront donc des sujets qui ne vous plairont pas toujours. C’est pourquoi, dans mon blog j’en arriverai à vous parler de sujets délicats dont on évite de parler publiquement.
Je dois déjà affronter cette difficulté avec mon livre « Amour et sexe dans vos rêves ». Soit certains vendeurs des librairies, soit d’éventuels lecteurs s’offusquent qu’on puisse parler d’amour et de sexe. Manifestement, ils ne s’occupent que des choses les plus élevées. Tout ce qui se passe en bas, sous la taille, berk ! C’est sale.
Mais ces grands dégoûtés ne vous racontent pas leurs rêves ! Bien sûr que non, parce qu’ils n’en sont pas toujours très fiers, et quand ils osent vous en parler, gênés, ils s’en excusent gentiment.
Alors, maintenant, je vais vous parler de rêves un peu « crades » qui sont très fréquents : des rêves du bas du corps, des excréments, des toilettes. Ce thème tient une très grande place dans les scénarios de nos nuits.
Ce n’est pas facile. Déjà au niveau des images ! Comment vais-je faire ?
Et puis, vous allez peut être vous vous exclamer :
« - Comment ? Mais vous venez de nous parler du divin ans les rêves, c’était magnifique.
Vous pourriez choisir des sujets moins triviaux pour ménager une transition moins abrupte.
Votre choix peut paraître quand même un peu choquant et maladroit, en tous cas vulgaire. »
Oui, mais moi, je n’ai pas envie de vous parler d’autre chose, et je sais bien pourquoi.
Il existe une loi dans la vie de l’inconscient. C’est la loi de l’alternance des contraires, illustrée actuellement par la célèbre image du Tao, l’alternance du Yin et du Yang.
Cette conception n’est pas l’exclusivité de l’Orient. Elle fait aussi partie de notre patrimoine culturel occidental, même si on l’oublie. Cette conception avait déjà été formulée par l’un des plus remarquables philosophes de l’Antiquité : Héraclite, ( 540- 480 avant J.-C.)
Tout est devenir, chaque chose se convertit en son contraire. Dans l’univers, les contraires font partie d’une unité fondamentale et s’affrontent éternellement pour se transformer.
Victor Hugo disait la même chose quand il soulignait la coexistence du sublime et du grotesque.
Et aujourd’hui, je vous explique ces considérations, parce que dans le dialogue entre le conscient et l’inconscient, avec les rêves, il en va de même. On ne peut pas monter sans descendre, parler du haut sans parler du bas. Plus on est monté haut, plus il convient de redescendre au plus bas.
Et soyez sûrs que, ce faisant, je ne fais que respecter la vielle et sage recommandation de mes prédécesseurs sur la voie des rêves, les philosophes hermétiques, appelés aussi les vrais alchimistes, les chercheurs de l’or non vulgaire, c’est à dire de l’or non matériel. Voici ce que conseillaient ces explorateurs de la voie intérieure, de l’inconscient :
« Prends cette chose qui est foulée aux pieds sur ses tas de fumier, sinon, voulant monter sans échelle, tu tomberas sur la tête ».
Cette chose, disent –ils, c’est l’or, qu’« on trouve dans les excréments », « ex stercore invenitur » selon l’expression latine d’alors.
Cette chose dans les excréments est foulée aux pieds, on la méprise, on n’en fait aucun cas, on la bafoue. Cependant ce mépris voue à l’échec toute tentative de monter à l’échelle, c’est à dire toute recherche spirituelle. Celui qui veut monter dans les hauteurs sans passer par le bas et regarder sa « merde », celui là n’arrivera à rien et sera renversé.
Ce qu’il y a de plus précieux provient du plus vil, pour arriver en haut, il faut d’abord passer en bas.
Quant à nous, nous serons plus prudents et moins dégoûtés, nous nous amuserons donc les prochaines fois à regarder au plus bas, à analyser ce que sont les rêves des toilettes et des excréments.
Au fait, dans le conte (qui est le rêves collectif) n'est-ce pas l'âne, qui fait des crottes en or ?
Illustrations
- La philosophie, sculpture du portail de Notre Dame de Paris
-L’âne : Dessin d’Epinal, vers 1870, pour le conte de Peau d’Ane de Charles Perrault.